Deux semaines avant les élections fédérales
de décembre 1917, le nouveau gouvernement de
coalition dirigé par Robert Borden promulgue
ce décret accordant aux fermiers et aux ouvriers
agricoles l'exemption du service militaire, ce qui permet
de neutraliser leur opposition à la conscription
et d'atténuer les tensions engendrées
par la crise de la conscription. En 1918, Borden revient
sur sa promesse, et le service militaire devient obligatoire
pour les fermiers.
Lorsque, le 1er janvier 1916, le premier ministre
conservateur Robert Borden promet que le Canada maintiendra
un effectif de 500 000 soldats outre-mer, il est évident
que cette promesse sera très difficile à
tenir. À l'été 1916, il n'y a
plus beaucoup de volontaires qui s'enrôlent.
Contrairement à la croyance populaire, que
partagent d'ailleurs souvent les gens instruits, les
Canadiens français ne sont pas les seuls à
s'opposer à la conscription. Bien des fermiers
et des ouvriers font de même. Les fermiers n'apprécient
pas que leurs fils doivent quitter la ferme, où
ils contribuent à l'effort de guerre en produisant
des denrées alimentaires. Les fermiers de l'Ouest
soupçonnent également le gouvernement
conservateur de Borden de se servir de la conscription
pour camoufler ses médiocres réalisations
dans le domaine des réformes économiques
et pour détourner l'attention du mécontentement
politique qui règne dans l'Ouest. Les ouvriers
considèrent la conscription comme la première
étape vers le service industriel obligatoire,
qui les forcerait à occuper le même emploi
pendant toute la durée de la guerre. Les fermiers
aussi bien que les ouvriers exigent qu'on instaure
la « conscription de la richesse » et
non la conscription de la main-d'œuvre.
En septembre 1917, le gouvernement Borden adopte
la Loi des élections en temps de guerre,
qui accorde le droit de vote aux Canadiennes qui sont
les mères, les épouses, les veuves,
les soeurs ou les filles de personnes, hommes ou femmes,
vivantes ou décédées, qui servent
ou ont servi outre-mer dans les Forces canadiennes
ou britanniques. Par la même occasion, il retire
le droit vote aux objecteurs de conscience et aux
Canadiens originaires de pays ennemis naturalisés
après 1902 (autrement dit, toute personne d'origine
allemande ou austro-hongroise arrivée après
1899). On a prétendu que la tendance de ces
nouveaux Canadiens à voter pour les libéraux
était la principale raison de cette mesure.
Les historiens ont fait remarquer qu'en 1917, ce ne
sont pas les électeurs qui ont choisi le gouvernement
mais plutôt le gouvernement qui a choisi les
électeurs. Deux semaines avant les élections
fédérales de décembre 1917, le
nouveau gouvernement de coalition dirigé par
Robert Borden promulgue un décret accordant
aux fermiers l'exemption du service militaire, neutralisant
ainsi leur opposition à la conscription.
Au début de 1918, il est devenu évident
que Borden ne pourra pas respecter les lourds engagements
militaires qu'il a pris et continuer à exempter
les fermiers canadiens du service militaire. Il revient
donc sur sa promesse au début de 1918, quelques
semaines seulement après que son gouvernement
de coalition a remporté les élections
de décembre 1917 grâce à l'appui
massif des Canadiens de l'Ouest.