Champlain intègre pour la première fois
l'Océan glacial à sa carte de la Nouvelle-France
en 1616 et l'ajoute plus tard dans sa carte de 1632.
Les Français sont si convaincus de l'existence
du passage du Nord-Ouest que celui-ci continue à
faire partie de leur tradition cartographique nord-américaine
pendant les 150 années qui suivent.
Certains historiens modernes se demandent si les
explorateurs du Nouveau Monde croyaient vraiment qu'il
était possible d'emprunter un itinéraire
uniquement maritime pour se rendre en Asie. Une chose
est certaine, cependant : les épices et les
soies d'Orient garantissaient des rendements plus
élevés que tout ce que le Nouveau Monde
pouvait offrir, y compris son commerce des fourrures
qui commençait à peine. Par conséquent,
si l'appât du gain n'avait pas incité
les Européens à explorer l'intérieur
du continent nord-américain à la recherche
du passage du Nord-Ouest, il aurait été
presque impossible d'obtenir des appuis financiers
pour réaliser des expéditions dans la
terra incognita du Canada.
En intégrant les eaux intérieures du
passage du Nord-Ouest à leurs cartes, les Français
se couvraient également. Si un autre pays européen
découvrait ultérieurement un Océan
glacial, la France pourrait formuler certaines
revendications au sujet du passage du fait que des
cartographes français avaient déjà
porté sur des cartes cette caractéristique
géographique.
Il n'est donc pas surprenant que le grand explorateur
et homme d'État Samuel de Champlain essaie
de profiter au maximum de tout élément
naturel qui suggère un passage maritime à
travers le continent. Dès 1601, par exemple,
Champlain promet à ses bienfaiteurs en France
que le fleuve Saint-Laurent offrira de grandes possibilités.
« Par cette [voie], prédit-il, nous pourrons
aller à Cathay... Nous pourrons faire le voyage
en un mois ou en six semaines sans difficulté. »
Quand ce scénario se révèle
trop optimiste, Champlain déplace simplement
le passage du Nord-Ouest plus à l'ouest, au-delà
de l'horizon, jusqu'à une autre voie navigable.